CARYL FEREY - Utu
Paul Osborne a quitté la police néozélandaise et est venu
se perdre en Australie. Le nouveau chef de la police d'Auckland vient l'y dénicher
pour essayer de découvrir ce qu'il s'est passé récemment,
quand Fitzgerald, son prédécesseur et ancien ami de Paul a abattu
un tueur en série et son complice un chaman maori, avant de se suicider.
Or le corps du chaman n'a jamais été retrouvé, et Paul
sait que Fitzgerald avait d'excellentes raisons de ne pas se tuer. Sur place,
il n'a pas que des amis, et, commence à mettre les pieds dans le plat,
secouer de hauts personnages qui ont le bras long, et se faire de plus en plus
d'ennemis, entre deux cuites qu'il fait passer aux amphétamines. Des
éléments apparemment sans lien avec son enquête : le cadavre
d'une jeune femme apparemment tuée par les requins, et le vol d'une hache
rituelle dans la résidence d'un riche entrepreneur connu pour ses positions
très méprisantes envers les maoris sont autant de pièces
qui viennent s'ajouter au puzzle, alors que vient à planer l'ombre d'Hana,
son amour d'adolescence qu'il n'a jamais pu oublier.
Attention au choc, 400 pages au rythme de Paul, homme enragé, blessé,
survolté et sans pitié, qui noie sa haine et sa détresse
dans l'alcool et la drogue. Ce qui ne l'empêche pas de démêler,
peu à peu cette intrigue complexe, sanglante et superbement rendue. Paul
est un magnifique exemple de ces héros sombres et ambigus qu'affectionne
le polar. La réalité néozélandaise qu'il contribue
à mettre à jour, sans montrer de compassion, ni pour les bourreaux
ni pour les victimes, est aussi sombre que son âme, et le lecteur emporté
dans un ouragan de violence et de haine comprend comment les personnages deviennent
de tels monstres, sans pour autant les excuser. Malgré quelques rares
rayons de soleil, l'ensemble est sombre, dérangeant et vénéneux,
et gare, une fois que l'on commence, impossible d'arrêter avant d'arriver
à la fin.
Jean-Marc Laherrère