ALAIN DEMOUZON - la promesse de Melchior


Depuis trois décennies, Alain Demouzon s'est imposé dans le paysage du polar français avec une manière inégalable de brouiller les pistes. Du roman le plus noir au suspense, il s'aventure dans des chemins très balisés dans lesquels il arrive, pourtant, à trouver toujours du nouveau.

Commissaire principal à Fontenay-Central, Jean-François Melchior aime sa banlieue grise, ses bords de Marne, ses gens ordinaires. Veuf d'une femme qu'il n'a cessé d'aimer et dont il fleurit toujours la tombe, il est aussi pourvu d'une fille et d'un petit-fils. Il fait partie de ces flics blessés qui masquent leur compassion derrière une apparente rudesse, mais qui n'hésitent pas à jouer les don Quichotte.

“ Melchior » tout court, c'est le titre de sa première enquête. Dans un recoin des docks, une jeune femme est éventrée, l'enfant qu'elle portait a été enlevé. Et il semble bien qu'elle ait du mal à retrouver la mémoire. Une drôle d'enquête, avec en fond sonore « It Might As Well Be Spring ”, un vieux standard de Rodgers et Hammerstein. Elle va même bifurquer vers de vieux secrets enfouis dans la famille du policier depuis les années de guerre.

Dans “ La Promesse de Melchior ”, les berges de la Marne ont cédé la place aux rivages de l'Atlantique. Chez sa cousine, le commissaire démis de ses fonctions traîne sa déprime. Jusqu'à ce que son métier le rattrape. Car les parents d'une jeune femme assassinée quelques années auparavant lui demandent de reprendre l'enquête. Ce qu'il fait non sans se faire prier, heureux malgré tout de reprendre, même à titre officieux, un collier qu'il déteste autant qu'il l'aime.

Les intrigues sont bien troussées, et l'attente du lecteur sans cesse piquée au vif. Mais c'est dans ses personnages que Demouzon met tout son art, et révèle une acuité psychologique toujours juste, celle des grands romanciers. Dans l'évocation de leurs drames intimes, ceux dont les brûlures sont indélébiles. Deux romans en forme de balade, au long desquels on croit entendre la voix déchirante d'un saxophone.

Michel PAROUTY.