COLIN HARRISON - Havana room
Une
improbable descente aux enfers.
Une vie saine suppose quelques précautions élémentaires
et alimentaires : on n'abuse pas du cigare lorsque l'on souffre d'insuffisance
respiratoire, il convient de se laver soigneusement les mains après avoir
mangé du poulet sauce thaï.
Faute d'avoir respecté ces consignes de base, les personnages de Colin
Harrison se trouvent tantôt propulsés au sommet de la fortune tantôt
plongés au plus profond de la misère. Le narrateur, Bill Wyeth,
est un avocat new-yorkais promis à un brillant avenir. Tout doit concourir
à sa carrière, même la liste des invités à
l'anniversaire de son fils.
Parmi eux, le gamin d'un banquier très en vue meurt à cause de
son allergie à l'arachide. C'est un accident, mais pour Bill Wyeth le
début d'une descente aux enfers. Grandeur et décadence d'un yuppie
new-yorkais, cela constituerait déjà un roman passionnant. Mais
l'aventure rebondit autour d'une steak house de Manhattan, le Havana Room, où
Bill Wyeth, devenu quasiment SDF, a ses habitudes. Il s'y trouve un soir obligé
de servir d'avocat-conseil à un inconnu voulant échanger un terrain
à patates au nord de Long Island contre un immeuble new-yorkais. Quelle
est la véritable raison de cette étrange transaction et en quoi
consistent les cérémonies secrètes au sous-sol du Havana
Room, dans un fumoir à l'accès réservé ? Sur fond
de spéculation immobilière Colin Harrison brosse un étonnant
portrait de New York et entraîne ses personnages dans des aventures où
l'on croise des truands, une femme d'affaires troublante, des hommes en mal
de paternité, une vieille dame indigne. Il joue avec maestria des situations
les plus incongrues en maintenant en permanence un juste équilibre entre
comédie et roman noir.
Le résumé qu'il donne en quatre pages de l'histoire de Manhattan
des origines à nos jours est un morceau de bravoure inoubliable. Au bout
du compte, les questions qui le hantent sont toujours celles des règles
d'une vie heureuse. Qu'est-ce qui fait battre le pauvre cœur des hommes,
l'amour, l'ambition, la fortune ? En refermant le livre, il n'est pas certain
que le lecteur ait obtenu la réponse, au moins il n'aura pas vu le temps
passer.
Gérard Meudal.