GEORGE P. PELECANOS - hard revolution
George
Pelecanos est né à Washington, y a grandi et, depuis quinze ans,
y situe ses romans. Pas du côté de la Maison-Blanche, mais dans
les quartiers populaires où les enfants, noirs et blancs, grecs ou italiens,
grandissent entre les gangs, la drogue et la prostitution. Son douzième
livre, Hard Revolution, commence en 1959 avec deux gamins noirs, deux frères
qui s'aiment et ne se ressemblent pas.
Dennis frime avec ses copains dans les rues ; Derek rêve de devenir policier
tout en vouant à son aîné une admiration fervente. On les
retrouve au printemps 68. Derek a revêtu son uniforme, mais souffre d'être
traité comme un traître par la communauté noire. Dennis
est revenu du Vietnam et sa rupture avec la société s'est accentuée.
Dans la ville, la misère gagne du terrain, le fossé racial aussi,
et Martin Luther King prépare une grande marche pour le mois d'avril.
George Pelecanos mène de front fiction policière, recomposition
d'une époque flirtant avec la nostalgie et coup de projecteur sur l'histoire
politique, notamment l'assassinat de Luther King. Ce roman est le concentré
des précédents : un retour sur sa propre jeunesse, un éclairage
sur l'adolescence de Derek Strange, héros récurrent dont on a
pu suivre les aventures de flic devenu détective privé par dégoût
du système. On retrouve ici tout ce qui séduit chez Pelecanos
: son amour de la musique soul, son regard à la fois généreux
et lucide sur une ville pourrissante. A travers Derek et Dennis, il nous parle
d'injustice et de morale flottante, nous rappelle qu'il suffit d'une rencontre
pour que tout bascule du côté du bien ou du mal. Il ose enfin évoquer
son enfance de Grec immigré, au travers d'une aventure hargneuse et tendre
qui se révèle un grand roman noir.
Christine Ferniot.