ALEXANDRA SCHWARTZBROD - balagan


Dans « Balagan », c’est la violence la plus spectaculaire qu nourrit l’intrigue, celle d’attentats terroristes qui frappent la population de Jérusalem. Une première bombe explose dans le quartier juif de la vieille ville immédiatement suivie par une autre dans le quartier arabe de Jérusalem-Est au temps de la deuxième Intifada. Comment, dans ces conditions, incriminer le Hamas ou une faction plutôt qu’une autre ?
Qui pourrait bien avoir intérêt à s’en prendre simultanément aux Juifs et aux Arabes ? La police israélienne est complètement déboussolée devant cette série d’attentats inexplicables et meurtriers et patauge lamentablement malgré les pressions du gouvernement qui exige qu’une piste soit rapidement trouvée. Au cœur de son roman, dans la position du témoin privilégié, Alexandra Schwartzbrod a placé un certain David Bergame « l’archétype du jeune diplomate ambitieux » qui a été envoyé par le Quai d’Orsay pour participer à une commission d’enquête européenne sur l’origine des violences israélo-palestiniennes.
La voix de toutes les parties : David a bien été prévenu : la plus grande difficulté sur ce terrain est de rester objectif. Bien sûr, Alexandra Schwartzbrod n’est pas naïve au point de croire qu’il suffit d’un peu de bonne volonté et d’impartialité pour régler le conflit israélo-palestinien et son David Bergame, pour sympathique qu’il soit, est un peu ridicule, imbu de lui-même et manifestement trop confiant dans les pouvoirs de la diplomatie.
Mais le grand mérite de ce roman bien informé est d’exposer aussi clairement que possible tous les éléments du problème et de faire entendre, sans restriction, la voix de toutes les parties prenantes, depuis celle des ultra-orthodoxes de Mea-Sharim jusqu’à celle des terroristes les plus fanatiques.
D’aucuns trouveront peut-être à redire à tel ou tel aspect politique du roman mais le souci d’objectivité de l’auteur est indéniable, et outre une intrigue qui vous tient constamment en haleine et une belle évocation de Jérusalem, ce seul trait suffirait à faire de « Balagan » un livre précieux par les temps qui courent, sans parler du personnage attachant d’Elie Bishara, policier arabe-israélien qui, par sa position ambiguë et inconfortable, est le seul à pouvoir comprendre le fin mot de l’énigme.

Gérard Meudal