FRANZ BARTLET - le bar des habitudes


Franz Bartelt fait basculer le quotidien et livre seize nouvelles douces et décalées.

Au Bar des habitudes, il suffit d'un détail pour que tout se grippe et glisse dans la confusion: une cliente qui n'est pas à l'heure, un homme refusant de quitter le zinc, un absent pour faire le quatrième à la belote coinchée. A la maison, même topo. Le mari se met à rêver qu'il tue sa femme, et les années de mariage sans le plus petit nuage se transforment en minutes de cauchemar. Un clochard joue les invités surprises dans une famille bien sous tous rapports et c'est l'hallali. En seize nouvelles, Franz Bartelt découpe ainsi le quotidien, le pousse dans ses retranchements, joue sur un mot, un sentiment, une situation et plonge dans l'incongru, dans une dérive qui fait tomber les masques, comme s'il faisait du saut à l'élastique avec ses personnages pour s'en rapprocher, s'en éloigner, s'en rapprocher encore.
Qu'il écrive des romans, des récits, des textes courts ou des polars, Franz Bartelt reste un oulipien du fantastique, un obsédé du minuscule comme ces piliers de bar qui s'installent dans le même coin obscur, se font oublier des pékins facilement envapés pour surprendre les nouvelles du dehors. Dans les bistrots du nord de la France où l'écrivain a ses quartiers, il croise des couples mous qui s'abandonnent au plaisir, meurent comme ils respirent, dans un double contentement muet. Un jour, il prend un train qui mène à ses souvenirs d'enfance mais ne s'arrête à aucune gare convenue.
Plusieurs fois, Franz Bartelt a mis ses pas dans ceux des poètes. Il a suivi Verlaine et Rimbaud dans des paysages d'Ardenne où le noir et blanc est une tenue de rigueur. Il a également accompagné l'œuvre d'André Dhôtel dans un texte quasiment initiatique (Aux pays d'André Dhôtel, aux éditions Traverses). De toutes ces influences, il a fait son miel, le nez dans la mousse de bière et les yeux dans les nuages. Désormais, Le bar des habitudes est un lieu de rendez-vous obligatoire, le détour nécessaire pour passer de l'autre côté d'un miroir un peu piqué, celui que l'on scrute les soirs de solitude: il vous renvoie votre visage, juste derrière le comptoir, quand on se dit qu'il faudrait prendre le chemin du retour, rentrer chez soi, là où personne ne vous attend.